Dégrafe
Inspiré par le travail de Joëlle Arnut Hanebali
Silhouettes d’éreintement, couleurs prises dans un étau d’onyx puis d’épure, entre or endeuillé,
funéraire - en phase d'extinction, de renaissance ? - et ocres tectoniques :
racine et source.
La vie l’errance, limbes surgies des étoffes d’antan, grisaille lumineuse, série d’oxymores troublantes.
trait sec, répété, épisode pourfendant l’espace
Répétition de l’entre-désir ; du nu plein les yeux, un érotisme éteint
nu,
retenu,
.
des corps nus se frôlent, se touchent peut-être, émargeant de toute sensualité.
corps émotion, corps en glissement vers leur propre devenir,
le dessin sonne le glas du dire, de l’écrire, va plus loin que l’entendement, il y a ces corps, ou le détail de ces corps, éparpillés faussement hasardeux, humains semblables à des diptères,
pourvus d'une paire de jambes, humains passe-partout, réutilisés ;
pièces à conviction d’une récurrence tenace et illusoire.
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Régenter les rayonnages d’humains,
les prendre et les reprendre à la faveur d’un dieu tout puissant,
rehausser la race humaine par des aplats, des dithyrambes,
introduire une disparité infinitésimale, (re)-semblance,
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une divergence ténue à l’œil nu.
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Un auriculaire, une cheville, l’oreille, une symphonie anatomique rare, qui cerne l’indicible, l’indivisible, qui dissèque pourtant, laboratoire sans dogme ni formule
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Des silhouettes inaliénables, rétives, alignées selon un ordre vaguement raisonné, chaos dans la
splendeur, la touche de l'artiste impromptue comme la patte du maître divin.
Joueuse l’artiste ? Futée comme le félin domestique, à la chasse de ses miniatures.
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Profils austères, avancent-ils, stagnent-ils ? Où en sont-ils de leur similitude ?
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La ligne, jamais figée, libre et mouvante, remuante, le copié-collé sibyllin qui donne du retors au spectacle, signe avant-coureur d’un exorcisme = à tant répéter le geste, la signature
que ne doit-on comprendre de cette matérialité ?
Une humanité qui se tient par la main, qui s’aligne en rangs plus ou moins serrés, au coude à
coude, cul par-dessus tête.
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Le dessin rend l'âme pour laisser place à la sensation, un certain degré atteint de prise à la gorge.
Qui sont ces êtres décharnés, nus, de quelle hécatombe sont-ils rescapés ?
Leur maigreur aride n’enlève rien à leur grâce, ne profane nullement leur profondeur, leur
grandeur primitive, ils grouillent, parfois empreints d'un voile impudique qui exhibe plus qu'il
ne dissimule,
abondent en tous sens comme un peuple des silences,
empreints de beauté, d’élégance, nus et dépouillés, mais cyclopéens de « microscopisme ».
Qui sont-ils, ce peuple de l’absurde, mêmes, et uniques ?
Nous ?
Stéphanie Gaou
Tanger, 4 février 2015